Menu

Vous êtes ici : Accueil > Actualités > Élargissement par la Cour de Cassation de la définition du "Préjudice d'agrément"

Élargissement par la Cour de Cassation de la définition du "Préjudice d'agrément"

Le 13 juin 2018
Élargissement par la Cour de Cassation de la définition du

Dans son arrêt du 29 mars 2018, la Haute juridiction vient d’élargir très significativement la notion de préjudice d’agrément. 

Dans la nomenclature Dintilhac, ce préjudice était défini comme « l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs » et apprécié « en tenant compte de tous les paramètres individuels de la victime (âge, niveau, etc.) ». 

Il s’agit donc d’une altération définitive de la capacité d’exercer une ou plusieurs activités de loisirs. Le terme « spécifique » est important : la victime ne peut arguer d’une perte de qualité de vie générale en sollicitant l’indemnisation de ce poste de préjudice. La Cour rappelant très régulièrement jusqu'alors que cette perte de qualité de vie était indemnisable au titre du déficit fonctionnel permanent. 

Il s'agissait d'une définition stricte de ce préjudice, indiquant qu’il appartient à la victime de rapporter la preuve de la pratique de loisirs avant l’accident pour en obtenir une indemnisation.

Récemment encore, la Cour de cassation refusait de reconnaître un tel préjudice au motif que le plaignant « ne justifiait pas d’activités particulières exercées régulièrement avant l’accident » (Cass. Civ 2e, 27 avril 2017 n° 16-13.740). 

Par son arrêt de mars 2018, la Cour de cassation assouplit son point de vue et reconnaît le préjudice d’agrément même en cas de simple limitation d’une pratique de loisirs.

Dans cette affaire, la victime est un skipper, grand sportif et amateur de sports nautiques. Après son agression, il ne peut plus prétendre aux mêmes résultats sportifs lors des compétitions et est « stoppé dans sa progression ». Il saisit la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions (CIVI).

Débiteur final de l’indemnisation allouée, le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI) fit grief à la décision des juges du fond d’avoir confirmé la décision de la commission, alors que, selon lui, le préjudice d'agrément est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisir, ce que la victime n’avait pas, en l’espèce, subi dès lors que son dommage avait seulement conduit celle-ci à freiner sa marge de progression en compétition des sports nautiques qu'il pratiquait avant l'agression, sans toutefois le priver totalement de la faculté de s’y adonner. 

Par arrêt du 29 mars 2018 n°17-14.499, la Cour de cassation rejette la demande du fonds de garantie:

« Mais attendu que le préjudice d’agrément est constitué par l’impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs ; que ce poste de préjudice inclut la limitation de la pratique antérieure ;

Qu’ayant retenu, par motifs propres et adoptés, qu’avant l’agression M. X… pratiquait, en compétition, un grand nombre d’activités sportives et de loisirs nautiques et que, depuis les faits, qui l’avaient stoppé dans sa progression, la poursuite, en compétition, de ces activités ne pouvait plus se faire avec la même intensité, son état physique l’y autorisant seulement de façon modérée et ne lui permettant plus de viser les podiums, et relevé que les conditions dans lesquelles il continuait à s’y livrer obéissaient désormais à un but essentiellement thérapeutique, c’est à juste titre que la cour d’appel lui a accordé une indemnité au titre d’un préjudice d’agrément »